Ce dimanche, dans le Télégramme, ça va encore hurler. Parce que je soutiens que les piaillements hab
Ce dimanche, dans le Télégramme, ça va encore hurler. Parce que je soutiens que les piaillements habituels contre le "laxisme" à l'école, ça n'est rien d'autre que de la gesticulation électorale. Une école pacifiée, c'est possible. On n'en prend pas le chemin. Mais lisez plutôt, cela s'appelle "C'est l'école qui est violente" :
C’est reparti. Il a suffi d’un téléphone portable et d’un gamin qui brandit un pistolet à eau. Est-ce admissible ? Non. Est-ce nouveau ? Non. Ce qui est nouveau, ce sont les réseaux sociaux et la fascination qu’ils exercent. Un adolescent mal embouché ne résiste pas à la tentation d’inverser l’ordre des pouvoirs, et la France s’embrase. Rétablissons l’autorité ! Injectons des policiers dans les collèges ! Halte au laxisme ! Depuis les « sauvageons » que pourchassait Jean-Pierre Chevènement, l’émotion est la même, la réaction politique aussi. Et la violence n’a ni décru ni monté.
Contrairement à ceux qui en parlent, j’ai passé des mois (et même un peu plus) dans les établissements dits sensibles, dans les banlieues. Et ce que j’ai observé risque de surprendre ou de choquer. D’abord, les personnages clés, gardiens de l’ordre et de la paix, s’appellent les conseillers d’éducation. C’est eux qui régulent, réagissent aux absences, contactent les parents, déminent les conflits. Ensuite, la violence est inversement proportionnelle au nombre de conseils de discipline. Un collège qui tourne mal est un collège qui n’a d’autre recours que la trique, c’est-à-dire le déplacement du problème, puisque l’instruction est obligatoire. Enfin, le calme pédagogique est, lui, directement proportionnel à l’existence de vraies équipes enseignantes, et à leur latitude d’action. Le reste n’est que blabla.
Beaucoup de jeunes profs se plaignent d’être lâchés dans la nature. Ils ont raison, c’est vrai. L’État met beaucoup plus d’argent sur le primaire que sur le secondaire, et sur les établissements tranquilles que sur ceux de la périphérie. Il recrute, pour la banlieue, des maîtres à la volée, et il y expédie les plus jeunes (ce qui n’est pas une mauvaise chose en soi, encore faudrait-il leur fournir le bagage adéquat). La dernière enquête Pisa (comparatif international) montre que la France ne sait pas, ne veut pas réduire l’inégalité scolaire. Les syndicats majoritaires, tout en poussant des cris d’orfraie, défendent bec et ongle un système où les carrières vont du tragique au douillet, et où les profs sont terriblement isolés.
Vous voulez une école paisible ? Commencez par former les maîtres, les encourager à travailler ensemble, soutenez-les. Et dites-vous qu’une école sans violence, c’est une école juste. La nôtre ne l’est pas.