

La réforme du bac et du lycée à l'aune du confinement?
Une année agitée, tumultueuse pour cette mise en place de la réforme du lycée et du bac
Le malentendu s’était installé dès le départ entre une majorité d’enseignants et le ministre tout particulièrement autour de la notion d’examen national et de l’entrée du contrôle continu dans l’obtention finale du bac.
Il s’est étendu entre les élèves et le ministre autour cette fois de la passation des E3C.
Les nouveaux programmes et leurs hautes (trop hautes) ambitions que ce soit de certaines matières du tronc commun –l’enseignement scientifique en particulier- ou pour la plupart des spécialités n’ont fait qu’aggraver le problème.
Et puis … la crise du coronavirus est arrivée, basculant les certitudes, les oppositions, d’une façon conjoncturelle s’entend…
Les E3C1 passées courant deuxième trimestre 2020 ayant eu leur lot d’incidents graves, de reports parfois multiples, avaient laissé un goût plutôt amer : les élèves, anxieux les refusant a priori, les enseignants se perdant dans la BNS ou refusant, a priori encore, la nouveauté de la correction numérique.
Et puis …le confinement.
Plus de présentiel possible, plus d’équité et plus de salles d’examens collectifs…
Alors …on a fait avec l’existant, le solide, ce sur quoi on pouvait se baser : le contrôle continu, le vrai, celui des notes trimestrielles.
Et les E3C2 de premières se sont transformées en contrôle continu, la moyenne des notes de l’année (en fait des deux premiers trimestres) les remplaçant. Pour l’instant il est écrit (mais cela peut changer en fonction de l’évolution de la pandémie) que les E3C3 devraient se dérouler à l’instar des E3C1.
A E&D, nous nous prenons à espérer que la réalité d’aujourd’hui aura raison de demain et que seul le contrôle continu (les moyennes du trimestre présentées dans leur finalité) remplacera les futures E3C3.
A E&D, nous nous prenons aussi à espérer que toutes les E3C seront remplacées par le seul contrôle continu et qu’enfin, syndicats d’enseignants et gouvernement, y verront le grand intérêt pour les élèves et aussi pour les enseignements.
Et d’ailleurs que nous montre la crise par rapport au bac, dernier de sa génération, pour nos élèves de Terminales ? Le retour à un contrôle continu, au calcul de la moyenne des moyennes trimestrielles des élèves. Et les mêmes syndicats, arcboutés sur un « examen national », c’est-à-dire avec des épreuves ponctuelles communes, demandant même (pour d’autres raisons il est vrai) la suppression de l’oral de français.
C’est le livret scolaire qui devient un objet essentiel dans l’obtention du diplôme. Y seront notées les moyennes des deux trimestres mais aussi les observations les plus précises possibles, les plus éclairées pour permettre aux jurys de modifier ces moyennes en fonction de ce que les équipes diront de l’investissement, du sérieux du candidat mais aussi de ses difficultés, pendant la période du confinement. Ainsi, ce n’est plus l’arbitraire d’un examen, aussi borné soit-il qui prévaudra mais bien la connaissance affutée qu’en a l’équipe enseignante. Gageons que nos élèves y gagneront !
Oui, l’ancien bac a vécu, il n’est d’ors et déjà plus ! Mais le bac réformé est encore trop vert, il a besoin lui aussi de passer au laminoir de cette crise pour en ressortir plus harmonieux et porteur de sens. Sa philosophie (et Pierre Mathiot l’a plusieurs fois redit) est d’en faire un examen qui évalue chemin faisant les acquis des élèves. Lorsque ceux-ci ont fait leurs deux années de cycle terminal, il leur est délivré. Cela veut donc dire que c’en est fini du bachotage, d’élèves (ceux que nous allons essayer de sauver cette année) qui travaillaient simplement le dernier mois et obtenaient le bac « à l’arrache »mais qui 6 mois après, avaient bien peu retenu de leurs années de lycée. On était dans la logique : qu’enseigner au lycée pour permettre aux élèves de réussir leur bac ? Désormais, l’on devra être dans : comment valider le plus précisément possible ce que les élèves ont acquis pendant le cycle terminal ? Cela change tout car cela recentre sur les apprentissages et les acquisitions des élèves, les évaluations du bac ne venant qu’éclairer, que donner le résultat de ces apprentissages.
Lorsque la normalité reprendra pied dans le quotidien scolaire, il nous faudra nous souvenir des affres passées pour ne plus recommencer les mêmes erreurs. Nous devons redonner de la sérénité à nos élèves. Celle–ci passera aussi par des évaluations adaptées et porteuses de sens. Nous avons su, dans cette terrible crise, apporter une réponse adaptée en terme d’examens, de modalités temporelles et pratiques de reprises en fonction des territoires. Apprenons à garder cette souplesse nouvelle pour notre grand ministère et gardons-nous d’un nouveau carcan qui explosera faute d’adaptation à ce que nous serons demain.
Francoise Sturbaut - Proviseure - Présidente d'E&D