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Le Déconfinement en REP +

 

Notre organisation pendant le confinement :

Au quotidien, les professeurs principaux ont été placés en 1ère ligne pour tenter de maintenir un lien scolaire avec les élèves de leur classe.

Les CPE intervenant en renfort (nous avons tenté de les solliciter pour qu’ils expriment des messages de remerciements et d’encouragement aux pompiers et aux soignants. De beaux poèmes ont été créés).

Les retours pour apprendre ce que les enseignants ont inventé pour entretenir ce lien scolaire avec leurs élèves sont encore très parcellaires.Il en ressort une relative inquiétude de la part des enseignants, les contacts téléphoniques et les réseaux sociaux ayant leurs limites.

Un certain nombre d’élèves, largement minoritaires a été très difficile à joindre. Il a fallu beaucoup d’insistance pour qu’enfin un contact aboutisse. Au final, tous les élèves ont été joints.

Cet accompagnement a permis de repérer plus ou moins vite qu’un certain nombre d’élèves n’était pas outillé pour travailler en visuel. Un dispositif a été mis en place au collège, pour pouvoir prêter des tablettes à quelques élèves (une quarantaine).

Autre source d’information pour accompagner les élèves dans ce temps si particulier. L’application Pronote permet de repérer quand a eu lieu la connexion au serveur, la plus récente de chaque élève. Même si, à l’évidence, une grand prudence est à poser à cet égard, puisqu’il est impossible d’avoir la moindre information sur ce qui ce passe après la connexion. Avec ces éléments, nous allons tenter  de tirer un certains nombre d’enseignements au moment où un déconfinement  partiel se met en place, au-delà des considérations toutes matérielles, liées à la gestion de la crise sanitaire.

 

La réalité scolaire du confinement :

L’état des lieux des connexions Pronote fait apparaître qu’un nombre assez important d’élèves, s'est connecté assez régulièrement au site (70 à 75%). Cela laisse entendre que leur régularité a été suffisante pour qu’ils aient bon an mal an, joué le jeu. Il est à remarquer aussi, que la moitié d’entre eux (un peu moins peut-être) a persévéré pendant la période de nos vacances.

D’autre part, dans ce groupe des élèves investis, nous avons eu le plaisir de repérer des bonnes surprises : des élèves peu investis en classe qui manifestement, l’étaient plus sous ce schéma de travail.

A contrario, ces connexions ont permis de repérer très vite les élèves non investis dans le télétravail. En réponse, des adultes (enseignants, professeurs principaux, CPE), sont intervenus pour alerter, ont cherché à prendre contact, ont montré une attention bienveillante et concernée à des élèves qui étaient en train de lâcher. Ainsi, un certain nombre d’entre eux (ils sont rares mais ils existent), a réagi et s'est  investi.

Il est difficile d’être précis aujourd’hui, mais il y a fort à parier que ces contacts fassent bouger les lignes pour la suite. Ils avaient l’objectif de mobiliser pour entrer dans le travail. Ils étaient dans le registre de l’encouragement, de l’empathie. Ils ont été appréciés, des remerciements ont été déclarés. Des représentations vont changer. Il faut nous convaincre que le climat de confiance dont nous avons besoin pour que nos élèves progressent s’est renforcé de par ces échanges (les prêts des tablettes entretiennent cette logique d’ailleurs).

Le contexte de ce télétravail mérite ainsi d’être interrogé.

Les élèves, face à leur écran étaient seuls. Seuls face à leur tâtonnement, face à leurs questions, leurs difficultés de compréhension. Par la force des évènements, ils ont donc dû faire front,  pour oser tenter. Ils ont donc vécu une expérience peut-être inédite dans leur scolarité, pour un certain nombre d’entre eux. Ils ont été mis en situation de responsabilité pour chercher. Peut-être ont-ils trouvé parfois suffisamment souvent, il faut l’espérer, pour avoir repéré qu’ils pouvaient comprendre. Qui sait si ces expériences n’ont pas été suffisamment importantes pour que leur confiance en eux se réveille, pour qu’un peu plus, ils aient de l’estime pour leurs capacités scolaires.

Ainsi, le télétravail inexploité jusqu’alors, est peut-être devenu un véritable outil pédagogique à destination des élèves malades, exclus ou décrochés. Peut-être est-il le moyen d’avoir un peu plus la main sur l’état du travail à la maison de certains élèves, un outil pour les accompagner en tout cas. D’autant que des professeurs s’en sont emparé et ont créé. Gageons qu’une véritable base de données soit en train de se constituer.

 

 

Les conditions du confinement :

Des éléments nous inquiètent :

La presse locale, les témoignages recueillis par les uns et les autres, laissent entendre que la situation de confinement a posé un certain nombre de difficultés dans le quartier.

Il a été mal accepté et les premières nuits ont été agitées au point de sonner le glas pour de nombreux véhicules.

Prises par l’angoisse, des familles ont déclaré ne pas avoir pu prendre le risque de sortir quitte à vivre dans une précarité de plus en plus lourde.

Nous savons aussi que le respect du confinement a été très relatif dans le quartier. Les conditions de logement sont parfois difficiles, les relations intra-familiales, déstructurées ou très dégradées rendant avec le temps, le fait de rester chez soi difficile voire impossible à supporter. En conséquence, la contagion a fait des dégâts dans le quartier, peut-être plus qu’ailleurs (nous n’avons pas suffisamment de recul pour l’évaluer). Nous avons des informations bien tristes : des parents ont été touchés. Des élèves ont vécu des moments de grande inquiétude. D’autres ont dû se prendre en charge pendant l’hospitalisation du seul adulte responsable partageant leur vie au foyer.

Nous sommes donc préoccupés, nous craignons de retrouver un certain nombre de nos élèves, très éprouvés par une expérience douloureuse.

Nous redoutons surtout, l’effet qu’a pu avoir ce bouleversant confinement sur nos élèves les plus fragiles. Ceux qui déjà, avaient besoin d’un solide étayage pour maîtriser leurs émotions, supporter les contraintes d’un cadre et se poser pour tenter d’apprendre. Inévitablement, tous leurs indicateurs sont au rouge. Leur environnement est fragile, peu contenant ni accompagnant. Leur investissement dans le télétravail a été chaotique ou inexistant. Il est donc raisonnable d’envisager que leur situation de décrochage se soit encore accentuée. Peut-être ont-ils été touchés de près ou de loin, par la pandémie.

Si l’on ajoute à ces contraintes, la prégnance des règles sanitaires, la période du Ramadan, il est sûr que l’expérience d’un déconfinement  partiel dans un tel contexte peut être une source de curiosité pour notre association. Je me propose d’en être votre rapporteur. Suite au prochain numéro, donc.

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Jean-Yves Degache, CPE, collège REP+, Membre du CA d'E&D

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